Conférence

30 août 2025
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Comment donner forme à des signes ? Comment leur faire suggérer un univers de sons et de signes visuels différents et complémentaires et de nouvelles associations poétiques.
Les signes de ponctuation et particulièrement le point d’interrogation nous entraînent vers les sonorités des mots qui forment l’interrogation en français et en chinois. -Dans ce travail, j’ai formé des signes. De nouveaux smileys peut-être constitués par l’agencement multiple de signes de ponctuation dans la communication écrite des jeunes particulièrement en Chine. J’ai formé des signes de ponctuation, des virgules sous forme d’épingles, des traits parfois d’union, d’interrogation et de parenthèse, donc de doute et d’aparté. La parenthèse est un entre deux, elle ne modifie pas le sens, mais donne une indication. Dans cet espace, elle s’ouvre comme une porte ovale sur un espace, ici de doute et de questionnement. La parenthèse permet la discontinuité, la digression sans lien syntaxique; la parenthèse accompagne mon mode de pensée et ma façon de créer par rhizome, résonnance et rebond et en quelque sorte, va me permettre de limiter mes explications. En français la ponctuation codifiée dès le 8éme siècle permet une lecture facilitée des textes. L’écrit, si interprétable jusqu’alors et si difficile à segmenter, se clarifie et devient, par la puissance des signes de ponctuations, une langue, modulée par de légers blancs, par des arrêts, des silences, des vides qui donnent naissance au souffle. Ce vide si nécessaire dans la création qui n‘est ni interruption ni manque mais comme le préconise la pensée chinoise un principe actif générateur d’énergie. Les changements de ton dans la phrase lue entrainent un rythme. Les textes désormais permettent les inflexions mélodiques, la codification de la cantillation et la déclamation. Le point d'interrogation, ressemble plutôt à l'origine à un point surmonté d'un trait zigzaguant vers la droite, figurant sans doute le mouvement ascendant de la voix. Dessiné au début à l’envers il acquiert rapidement sa forme définitive. Le ton peut alors monter dès que l’œil perçoit le pt d’interrogation à la fin de la phrase, comme sur cet escalier. La forme interrogative orale dans la plupart des langues requiert cette montée de la phrase. En français, l’inversion de la place du pronom et du verbe signifiera sa présence. En chinois, la transformation est plus tardive. La simplification de la langue écrite commence au début des années 20 et marque un changement profond de la société chinoise. Les signes de ponctuation remplacent des « mots vides ». C’est la particule interrogative nodale « ma »placée en fin de phrase qui, en transformant une déclaration en interrogation sans changer l’ordre des mots, m’a particulièrement apostrophée. J’ai donc remplacé la forme interrogative de mes questionnements par un signe devenu obligatoire en français, immense ici et placé entre parenthèse. Il ponctue la forme devenue visible de mes doutes et mes incertitudes, et forme une autre figure de style, un oxymore, une installation éphémère. Car si installer signifie, se poser, c’est au contraire grâce à l’aller et retour entre plusieurs cultures que l’interrogation persiste et s’installe. L’installation instaure un happening interactif. Un moment d’écriture partagée, conservée par l’image vidéo qui fixe un moment d’écriture calligraphiée sur un rouleau éphémère et recouvrable comme un palimpseste si je n’encre pas l’eau avec laquelle vous pourrez y déposer vos citations, vos questions , vos observations. . La matérialité des supports et des substrats m’importe énormément, ils sont des déclencheurs d’imaginaire et des constituants de ma pensée. Pour cette installation, je suis revenue à certains éléments essentiels de mon vocabulaire de base plastique. Le nombre des matériaux est volontairement réduit pour donner une meilleure visibilité à l’encre, à l’eau et aux pigments. Le zinc comme mémoire du temps qui passe et des intempéries, Le feutre et l’intissé, comme mémoire de l’habitat, de ses transhumances et comme mémoire du vêtement, le fil et le fil de fer comme fil conducteur. Le métal, le zinc qui forme mes signes de ponctuation, est un matériau souple de couverture, de recouvrement tel un manteau. Il garde les traces régulières de son contact avec l’ossature, sa volige, qu’il épouse et sur laquelle les plaques de zinc reposent. Les marques de la sève sèche du bois se déposent peu à peu, telles des empreintes imprimées sur sa face cachée de subtiles couches de laque, pendant qu’il reçoit sur l’autre face exposée la couleur des ciels qu’il regarde, en formant des trainées blanchâtres qui le caractérisent et le protègent. Utilisé à profusion depuis les rénovations de Paris par le baron Haussmann pour sa facilité d’emploi, il donne son identité aux toits parisiens. Le zinc est devenu une figure de Paris constitutive de sa mémoire architecturale. J’ai utilisé le zinc de l’ancienne toiture de mon atelier. Conservé 10 ans dans ma réserve, j’utilisais avec parcimonie quelques morceaux patinés pour des graphies incertaines et parfois gravées, sans oser espérer un tel emploi. J’ai assemblé les plaques fines et minces en imbriquant leurs bords, car le matériau vieilli refuse toute soudure, puis j’en ai découpé les pourtours avec un chalumeau et j’ai arrondi les formes aux bordures brulées ainsi obtenues. Les 7 morceaux principaux du point d’interrogation ne sont pas tous jointifs et ces fractures sont importantes. Elles obéissent à la géographie topographie du lieu et laissent circuler le vide et partiellement, les graphies illisibles des longues bandes de feutre peintes. Les plaques découpées deviennent des écailles, des carapaces étranges revêtues très partiellement d’une écriture rouge illisible come une écriture ossécaille imaginaire. Les plots sont réalisés dans de minces bandes découpées dans de vieilles plaques. Le feutre est un matériau très ancien obtenu par foulage de fibres et de poils d’origine animale de toute nature, surtout ceux de laine. Il absorbe l’humidité ce qui le rend extrêmement résistant. C’est donc un textile intissé. Utilisé d’abord par les tribus nomades pour sa grande résistance, on le retrouve partout par la suite surtout dans les pays qui subissent le vent et le froid. Il boit l’encre et l’eau. Il est donc utilisé par les calligraphes et porte l’empreinte délavée de leurs signes écrits et dessinée la trace de leurs pensées. C’est pour moi le matériau symbole tout à la fois de la perte et de la rétention. Autant vous dire qu’il réagit avec violence aux pigments. Il se modèle aisément mais se peint avec difficulté car l’eau et l’huile se répandent, indifférentes au tracé de la main. J’y compose depuis 3 ans mes chemins mes paysages que j’ai appelé mes « graphiterres) » à l’aide de poudre de graphite, de pigment de zinc, de crayon, de pastels et parfois d’acrylique. Le paravent en est revêtu ainsi que les marches. Le paravent sert d’habitude de seuil derrière lequel on peut se dissimuler aux regards. Je vous invite paradoxalement à le contourner, à cheminer le long de ses panneaux, à soulever ses voilages de feutre. Les plis des tissus ou des toiles sur lesquels je travaille sont les marques du temps et parfois des petites digues inutiles qui arrêtent le regard et tentent sans succès de modifier dans leur replis la mémoire et les intempéries. Le papier, intissé également, reçoit vos écrits et la projection de leurs images. Les épingles et le fil ont repris leur rôle. Les épingles font le lien entre un travail sur le corps et le vêtement, la couture et la géographie. Elles conduisent le regard et délimitent des espaces, bornent mes paysages en se mêlant aux traits et aux lavis. Contrairement aux aiguilles d’acuponcture, elles invitent à se départir du corps et de ses méridiens ; pour d’autre voyages. Le fil de fer, je l’ai beaucoup utilisé par le passé, comme ossature, ou comme grille, Vocabulaire de base abandonné, délaissé, repris, fer rouillé, tissu au rebut, draps reprisé, méprisé. Matériaux devenus matières à penser l’avenir: mes fil rouges. Puis arrivent mes graphies ; des lettres informes souvent, des lettres réinventées, langues oubliées, écritures mélangées comme un espéranto inconscient. Les couleurs employées ici sont celles que j’utilise le plus fréquemment et celles que j’associe à la Chine : Noirs, rouges, blancs noir de l’encre, blanc de la page, du silence de la perte, et des gris, tous les gris chatoyants, profonds légers, denses, épais, intenses. Chacune un monde, un flot. Conclusion ---Certains dans les peintures que je présente autour de cette installation y verront un dos. Un dos aphalle, acéphalle et asexué qui se tient sur le seuil, hésitant entre le présent le futur et le passé qui évoque parfois l“Angelus Novus” peint par Paul Klee et décrit par Walter Benjamin un corps pousse irrésistiblement vers le futur auquel il tourne le dos, cependant que, devant lui, s’amassent les débris. --Les graphies que j’ai tracées sur les feutres du paravent et du sol sont pourtant les lignes d’un chemin. Une voie intime individuelle, aux multiples ramifications qu’il nous faut parcourir, connectée aux autres, aux éléments naturels, aux civilisations du monde qui nous apportent, la richesse de leurs pensée, de leur histoire particulière et avec lesquelles nous pourrons bâtir, chaque jour davantage, notre futur commun. --Pour cette installation, réalisée pour le festival Croisements, j’ai tenté de nouer un réseau entremêlé d’images, de sens sons. Le son MA chinois, qui traduit une des formes possibles de l’interrogation, m’a transportée momentanément vers d’autres rives, comme celle de l’espace-temps japonais ou du quoi hébraïque qui tous deux se prononcent ma. La forme du point m’a entrainée dans les liaisons fertiles et si présentes dans l’architecture chinoise du cercle, du carré et du rectangle. L’enveloppe aux bords brulés du zinc m’a conduite vers la peau, et coutures, et le vêtement. Les rouleaux des papiers m’ont promenée vers la vague, l’écriture vers le fleuve Chacun pourra y voir ses propres entrelacements, mais lesquels ?  
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